Le quartier vu par ses habitants - 1990

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Le quartier est l'espace d'une vie sociale, économique et politique qui s'inscrit dans la structure bâtie de la ville et dans son histoire. Il se caractérise par les activités qui s'y déroulent et par sa population. Il s'agit donc d'un lieu de coexistence et de conflits entre différents groupes et individus, entre habitants et acteurs sociaux d'autres lieux. C'est également une partie d'un tout beaucoup plus large, ville ou agglomération. La région urbaine en forte transformation entraîne des changements de fond dans ses sous-ensembles spatiaux et des différenciations dans la composition de la population au niveau micro-local. La structure interne d'une ville et les changements qu'elle connaît doit être appréhendée sous l'angle du contexte régional dans lequel elle se situe. Dans l'agglomération, le poids relatif de la ville-centre, en termes de population, a diminué dans les années soixante et soixante-dix. Dans ces mêmes années, les communes de la couronne, en fort développement, ont peut-être perdu en tant qu'espace d'identité mais ont gagné en importance politique. Dès lors, le rôle des différentes unités de l'agglomération est à repenser et de fait redéfini par les habitants. Les quartiers des villes-centre semblent être parmi les plus touchés et un déficit politique se marque le plus à ce niveau. La structure de la population et sa répartition dans l'espace urbain sont sujettes à variation selon la région considérée, et chaque espace urbain est organisé institutionnellement et politiquement de manière propre. Les unités (quartiers ou communes) possèdent des prérogatives fort variables. On peut décrire de manière dichotomique deux modes d'organisation. Dans le premier cas, des compétences relativement étendues sont données aux unités urbaines (quartiers, communes), qui permmettent à une majorité d'habitants de s'engager activement. Dans le deuxième, les autorités possèdent une grande liberté d'appréciation et de décision face à de multiples mouvements d'habitants, dans un système de consultation instauré depuis "en-haut". Cette recherche, qui s'inscrit bien spécifiquement dans le contexte suisse, s'est déroulée simultanément dans six villes choisies, pour avoir valeur d'exemple, selon plusieurs critères: la taille, la structure économique, le degré d'autonomie accordé au quartier et enfin la région linguistique. Il en découle la sélection suivante: - Berne, grande ville dans le contexte suisse, où l'institutionnalisation des quartiers est largement présente et où de nombreux échanges ont lieu pour adapter plus ou moins la structure des organisations locales; - Genève, grande ville également mais où les quartiers et les communes ont une autonomie limitée; - Lausanne, la plus petite des grandes villes, où une nouvelle délimitation des quartiers a eu lieu récemment alors même que d'anciens mouvements sont toujours plus ou moins représentés dans les différents secteurs de la ville; - La Chaux-de-Fonds, la seule ville moyenne de Suisse qui ne possède pas d'agglomération, dans laquelle les quartiers ne sont institutionnellement pas définis strictement; - Neuchâtel, ville moyenne également mais entourée d'une assez grande agglomération, qui a mis sur pied, ces dernières années, un mode de participation basé sur le quartier; - Winterthur, ville dont la division se base sur les limites d'anciennes communes ayant fusionné. Celles-ci (ainsi que les plus petits quartiers) jouissent d'une institutionnalisation relativement forte, correspondant notamment aux découpages scolaires et paroissiaux. Une des questions centrales est de savoir si, et dans quelle mesure, les différentes unités infra-urbaines (quartiers, communes sub- et périurbaines), leur institutionnalisation, les organisations qui y sont présentes et leur plus ou moins forte différenciation du point de vue de la composition sociale vont permettre, voire favoriser, l'intégration de la population et son engagement dans la vie politique. Finalement, dans quelle mesure ces différentes formes d'organisation de l'espace urbain se distinguent-elles lorsqu'il s'agit de confronter une ville à son devenir? S'intéresser au thème du quartier présente aujourd'hui quelque chose de paradoxal. Alors que toute l'évolution récente semble parler de mobilité, d'échanges, d'internationalisation, pourquoi consacrer une longue recherche à un espace aussi limité, aussi petit, que le quartier? Deux hypothèses générales justifient cependant une recherche dans le domaine. Premièrement, si beaucoup d'habitants ne se reconnaissant plus dans leur quartier, cela ne veut pas dire que les attaches locales ont nécessairement disparu. Il s'agit dinc de faire le point sur ce qui relie aujourd'hui encore un habitant à son environnement. Deuxièmement, ce n'est pas parce que les intérêts politiques se déplacent vers les sphères nationales ou internationales que le local n'intervient as dans la discussion. Du point de vue politique, l'intérêt de l'analyse du rôle du quartier se concentre surdeux éléments. 1. Pour les autorités, au moment où il est de plus en plus difficile de faire aboutir les projets d'aménagement urbain et où les formes d'encadrement traditionnelles s'effritent, le quartier est-il susceptible d'offrir un niveau de consultation et de discussion facilitant la gestion urbaine? 2. Pour les habitants, est-ce que la possibilité de s'exprimer par rapport à son environnement est susceptible de changer le rapport à la politique urbaine et à l'investissement dans les affaires locales? Ce projet de recherche est basé sur une série d'entretiens avec les autorités, une enquête auprès des habitants et l'analyse de données statistiques.

The neighborhood is the space of a social, economic and political life that is part of the built structure of the city and its history. It is characterized by the activities that take place there and by its population. It is therefore a place of coexistence and conflict between different groups and individuals, between inhabitants and social actors from other places. It is also part of a much larger whole, a city or an agglomeration. The heavily evolving urban region is causing fundamental changes in its spatial subsets and a differentiation in the composition of the population at the micro-local level. The internal structure of a city and the changes it experiences must be viewed in terms of the regional context in which it is situated. Within the agglomeration, the relative weight of the city-center in terms of population has decreased in the sixties and seventies. During those years, the peripheral communes, which are in full development, may have lost their spatial identity but have gained political importance. Therefore, the role of the different units of the agglomeration is to be reconsidered and redefined by the inhabitants. Central-city neighborhoods seem to be among the most affected and a political deficit is most pronounced at this level. The structure of the population and its distribution in the urban space are subject to variation according to the region considered, and each urban space is organized institutionally and politically in its own way. The different units (neighborhoods or communes) have very variable prerogatives. Two modes of organization can be described in a dichotomous manner. In the first case, relatively extensive skills are given to urban units (neighborhoods, communes), which allow a majority of inhabitants to get actively involved in public matters. In the second, the authorities have great freedom of appreciation and decision with regards to the multiple movements of inhabitants, in a system of top-down consultation. This study, which is specifically adapted to the Swiss context, took place simultaneously in six selected cities, to serve as an example, according to several criteria: the size, the economic structure, the degree of autonomy granted to the neighborhoods and finally the linguistic region. The following selection results: - Bern, a large city in the Swiss context, where the institutionalization of neighborhoods is widely present and where many exchanges take place to adapt more or less the structure of local organizations; - Geneva, a large city as well, but where neighborhoods and municipalities have limited autonomy; - Lausanne, the smallest of the big cities, where a new demarcation of the neighborhoods took place recently even though old movements are still more or less represented in the various sectors of the city; - La Chaux-de-Fonds, the only medium-sized city in Switzerland that does not have an agglomeration, in which neighborhoods are not institutionally strictly defined; - Neuchâtel, a medium-sized town but surrounded by a fairly large agglomeration, which has set up, in recent years, a mode of participation based on the neighborhood; - Winterthur, a city whose division is based on the boundaries of former municipalities that have merged. These (as well as the smaller neighborhoods) enjoy a relatively strong institutionalization, corresponding in particular to the school and parish divisions. One of the central questions is whether, and to what extent, the different sub-urban units (neighborhoods, suburban and periurban communes), their institutionalization, the organizations that are present and their more or less strong differentiation in terms of social composition will allow, or even promote, the integration of the population and its involvement in political life. Finally, to what extent do these different forms of organization of the urban space stand out when it comes to confronting a city to its future? The interest in the issue of neighborhoods today presents a somewhat paradoxical aspect. While all recent developments seem to docus on mobility, exchanges, internationalization, why devote a study to such a limited geopgraphical space as small as the neighborhood? Two general hypotheses, however, justify research in the field. First, if many people do not identify themselves with their neighborhood anymore, this does not mean that the local ties have necessarily disappeared. It is important to take stock of what still binds an inhabitant today to his environment. Secondly, it is not because the political interests are moving towards the national or international spheres that the local aspects do not intervene in the discussion. From a political point of view, the interest of the analysis of the role of the neighborhood focuses on two elements. 1. For the authorities, at a time when it is increasingly difficult to bring urban development projects to fruition and where traditional forms of supervision are crumbling, is the neighborhood likely to offer a level of consultation and discussion facilitating urban management? 2. For locals, is the ability to express their opinions on their environment likely to change the relationship to urban policy and investment in local affairs? This research project is based on a series of interviews with the authorities, a survey of the inhabitants and the analysis of statistical data.

Identifier
DOI https://doi.org/10.23662/FORS-DS-45-1
Metadata Access https://datacatalogue.cessda.eu/oai-pmh/v0/oai?verb=GetRecord&metadataPrefix=oai_ddi25&identifier=2e69aceba6e4702d77457dfb645d204c157b1a02546d25de10e7de7e20a54eb5
Provenance
Creator Joye, Dominique; Chiffelle, Frédéric; Bassand, Michel
Publisher FORS
Publication Year 2000
Rights Restrictions supplémentaires: Aucune; Zusätzliche Einschränkungen: Keine; Additional Restrictions: None; Permission spéciale: Aucune; Sondergenehmigung: Keine; Special permission: None
OpenAccess true
Representation
Discipline Social Sciences
Spatial Coverage Europe occidentale; Westeuropa; Western Europe; Suisse; Schweiz; Switzerland; Europe; Europa; Europe